Un motif tiré de la vie personnelle peut justifier un licenciement, mais à condition d’avoir une influence avérée sur la vie professionnelle du salarié.

Un salarié est engagé par une société en 2007 avec reprise de son ancienneté à compter du 3 janvier 2006.

L’employeur, lui reprochant d’avoir commis des infractions au code de la route sur son temps de trajet avec le véhicule de fonction de l’entreprise, le licencie pour faute grave le 13 décembre 2016.

Le salarié saisit la juridiction prud’homale afin de faire reconnaître son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La cour d’appel de Versailles fait droit aux demandes du salarié en se fondant, notamment, sur la circonstance que les infractions avaient été commises alors que le salarié n’avait pas encore commencé sa journée de travail.

L’employeur exerce un pourvoi en cassation au motif que peu importe que les infractions aient eu lieu en dehors de son temps de travail, ce qui importe en revanche c’est qu’elles aient été commises avec le véhicule de fonction.

La Cour de cassation, qui rejette le pourvoi, a rappelé qu’« un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail » (Cass. soc., 4 octobre 2023, n°21-25421).

Elle se fonde sur les différents constats que la cour d’appel a retenus :

–  les infractions au code de la route avaient été commises durant les temps de trajet, pendant lesquels le salarié n’était pas à la disposition de l’employeur : l’article L 3121-4 dispose que le temps pour se rendre sur son lieu de travail n’est pas du temps de travail effectif ;
–  l’outil de travail mis à sa disposition n’avait subi aucun dommage : des dommages au véhicule de fonction auraient pu justifier la faute grave (Cass. soc., 19 janvier 2022, n°20-19742) ;
–  le comportement de l’intéressé n’avait pas eu d’incidence sur les obligations découlant de son contrat de travail en tant que mécanicien.

La frontière entre vie professionnelle et vie personnelle reste toutefois ténue lorsqu’un véhicule de fonction est au cœur du litige.

 

CE QUE DIT LA LOI
L’article L 1232-1 du Code du travail dispose :
 Tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.
Il est justifié par une cause réelle et sérieuse.

L’article L 1235-1 du Code du travail, sur le rôle du juge, précise :
 (…)
À défaut d’accord, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il justifie dans le jugement qu’il prononce le montant des indemnités qu’il octroie.
Si un doute subsiste, il profite au salarié.

PATRICIA DREVONSecrétaire confédérale au Secteur de l’Organisation, des Outre-Mer et des Affaires juridiques

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