L’employeur, informé de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral au travail, doit agir le plus rapidement possible : cela découle de son obligation de sécurité. Pour obtenir des éclaircissements sur les faits reprochés, l’employeur doit généralement organiser une enquête interne (Cass. soc., 27-11-19, n°18-10551).

Le déroulement de cette enquête est sujet à interrogations, et ce, d’autant plus que celle-ci sert « d’appui » à l’employeur (notamment en justice) pour motiver le licenciement de son salarié.

Rappelons, en effet, que c’est à l’employeur de prouver le caractère réel et sérieux du licenciement prononcé et que la preuve en la matière est libre.

Le salarié doit-il nécessairement être tenu informé de l’existence de l’enquête interne dont il fait l’objet ? Voire doit-il y être associé ? L’enjeu de cette interrogation consiste en la recevabilité de la preuve en justice.

Deux principaux arguments ont été évoqués par les salariés pour arguer de l’irrecevabilité en justice d’une telle preuve en raison de son caractère déloyal :

d’une part, une telle enquête interne serait soumise aux dispositions de l’article L 1222-4 qui interdit de collecter des informations concernant personnellement un salarié par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance ;
d’autre part, cela découlerait de l’exigence de respecter les droits de la défense et le principe du contradictoire au cours de l’enquête.

Ces arguments ont été balayés par la Cour de cassation. Pour la Cour de cassation, une enquête menée à l’insu du salarié concerné ne constitue pas une preuve déloyale, issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié (Cass. soc., 17-3-21, n°18-25597). Ce principe a été rappelé dernièrement (Cass. soc., 6-12-23, n°22-14062).

C’est, pour finir, au stade du contentieux (et non lors de l’élaboration de l’enquête) que le principe du contradictoire doit être restauré.

Ainsi, l’employeur peut parfaitement produire les résultats d’une telle enquête en justice, à charge pour le juge d’en apprécier la valeur probante, dans la limite des investigations illicites menées par l’employeur et au regard, le cas échéant, des autres éléments de preuve produits par les parties.

Il appartient donc au juge de faire le tri en écartant les éléments de l’enquête et d’appréciation figurant dans le rapport reposant sur des moyens de preuve illicite (Cass. soc., 29-6-22, n°21-11437).

L’arrêt du 6 décembre dernier fait une application de ce principe : un juge peut parfaitement retenir certains éléments figurant dans le rapport et en rejeter d’autres.

En l’espèce, pour considérer la réalité des faits de harcèlement moral établis, la cour d’appel n’a pas retenu l’appréciation tirée par la commission d’enquête de l’écoute d’enregistrements audio du salarié réalisés à son insu.

Ont, en revanche été retenus, les éléments résultant d’une lettre et de courriers électroniques de deux des subordonnées de l’intéressé ainsi que par les déclarations de neuf salariés, recueillies par la commission.

A la SG, il existe une procédure interne. Si vous avez des questions sur le sujet : contact@fosg.net

PATRICIA DREVON Secrétaire confédérale au Secteur de l’Organisation, des Outre-Mer et des Affaires juridiques

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