L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante, à remplir ses fonctions ou les tâches qui lui sont confiées (ex : des compétences professionnelles manifestement insuffisantes, des échecs à des formations obligatoires, un travail de qualité insuffisante, des objectifs réalisables non atteints…).
Elle ne doit pas être confondue avec la faute disciplinaire qui est un manquement du salarié à ses obligations professionnelles envers l’employeur. La faute peut résulter d’un manquement au règlement intérieur (ex : discipline), aux règles de sécurité ou aux règles de vie en communauté de travail. Elle suppose une mauvaise volonté délibérée (Cass. soc., 16-2-12, n°10-18162).
L’inexécution fautive ou l’exécution volontairement défectueuse du travail (ex : baisse volontaire de rendement…) peut justifier une sanction disciplinaire mais les simples insuffisances professionnelles ne sauraient constituer des fautes (Cass. soc., 19-6-02, n°00-43602).
Des erreurs ou autres négligences imputables au salarié ne peuvent revêtir un caractère fautif (Cass. soc., 23-5-13, n°12-12914).
En revanche, la répétition des erreurs de caisse ainsi que l’énormité du déficit constaté dans une seule journée caractérisent un manque d’attention extrême de la part de la caissière et un total désintérêt pour son travail constituant une faute et non une simple insuffisance professionnelle (Cass. soc., 28-11-06, n°06-40013).
Pour justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle, l’employeur doit se baser sur des faits objectifs, précis et vérifiables, imputables au salarié.
Il peut notamment décider, en vertu de son pouvoir de direction, d’évaluer un salarié. Le salarié qui refuse de s’y soumettre commettrait une faute grave. Toutefois, un résultat négatif à un test professionnel ne suffit pas, à lui seul, à justifier un licenciement (Cass. soc., 18-7-00, n°98-44591).
L’employeur qui n’a pas délivré au salarié les formations suffisantes pour lui permettre d’exercer convenablement ses fonctions ne peut valablement pas prononcer un licenciement pour insuffisance professionnelle ou insuffisance de résultats (Cass. soc., 29-11-07, n°05-42004).
Dans une décision en date du 9 juillet 2025, la Cour de cassation a conditionné expressément la validité d’un licenciement pour insuffisance professionnelle au fait que l’employeur ait préalablement assurer au salarié des formations et tutorats pour l’aider dans la bonne continuation de la marche des affaires et mis en place un plan de retour à la performance ou un plan d’accompagnement (Cass. soc., 9-7-25, n°24-16405).
Dans cette affaire, l’employeur reprochait une insuffisance professionnelle au salarié qui, malgré des mises en garde, n’avait pas atteint ses objectifs quantitatifs et n’avait pas fourni, dans le cadre de son travail, la prestation attendue et n’était pas parvenu à remplir ses fonctions de manière satisfaisante. Faute pour l’employeur d’avoir assuré au salarié des formations adaptées pour que celui-ci s’améliore dans son travail, la Cour de cassation a considéré que l’employeur ne pouvait pas le licencier valablement pour insuffisance professionnelle.
Sauf dispositions conventionnelles particulières, l’employeur, confronté à un problème d’insuffisance professionnelle, n’a pas, en principe, l’obligation de proposer au salarié un poste de travail plus adapté à ses capacités.
En conclusion, le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un salarié sans que l’employeur lui ait délivré préalablement une formation adaptée sera jugé sans cause réelle et sérieuse, même si les insuffisances sont bien caractérisées. Si l’employeur n’est pas soumis à une obligation de reclassement face à des insuffisances professionnelles, il pèse, sur lui, une véritable obligation de formation préalablement à toute rupture pour ce motif.
Pour les salariés protégés, le Conseil d’État adopte une position quelque peu différente. L’inspecteur du travail doit, avant d’autoriser le licenciement d’un salarié protégé pour insuffisance professionnelle :
s’assurer que l’insuffisance professionnelle du salarié ne résulte pas d’un manquement de l’employeur à son obligation d’adapter le salarié protégé à son poste de travail et au maintien de sa capacité à occuper un emploi en mettant en œuvre, le cas échéant, les actions de formation nécessaires ;
vérifier que l’employeur a cherché à lui confier d’autres tâches susceptibles d’être mieux adaptées à ses capacités professionnelles (CE, 2-12-24, n°487954).